Lors d’un stage au sein d’Équit’harmonie, Élise Machault a pu échanger avec Camille Lambert, chargée de développement de l’association et coordinatrice du projet de poney itinérant. Dans cette interview, nous vous présentons les détails de ce projet qui mobilise déjà de nombreux partenaires dans le Perche.
Comprendre le poney itinérant : on vous explique tout !
Élise : Peux-tu nous présenter ce projet ?
Camille : L’objectif est de déplacer les poneys au sein des lieux de vie, au plus près des personnes en situation de précarité ou d’isolement, afin de répondre à des situations d’isolement social de plus en plus difficiles. Il nous semble très important de pouvoir permettre à des personnes isolées de bénéficier de la médiation équine et du contact avec les chevaux. En effet, par sa dimension sensorielle, ludique et par les stimulations émotionnelles et intellectuelles qu’elle apporte, la médiation équine est un outil très pertinent pour accompagner les publics vulnérables. En intervenant directement sur les lieux de vie et les établissements médico-sociaux, nous nous situons dans une perspective “d’aller vers”, afin de réduire les frontières d’accès à des activités de bien-être.
Les poneys, grâce à leur capacité d’accueil et de non-jugement, sont un véritable soutien pour mieux vivre. Ils apportent à la fois de la confiance, de la remobilisation mais aussi un accès à des souvenirs ou à des sensations corporelles oubliées. Ils apportent ainsi un réel moment de respiration, de douceur dans un quotidien parfois difficile.
Comment a émergé l’idée du poney itinérant et depuis combien de temps exercez-vous cette activité ?
En 2020, pendant les premiers confinements liés à la crise du covid 19, nous avons tou·te·s observé un accroissement de l’isolement. De nombreuses difficultés ont été vécues : solitude, difficultés familiales voire violence, perte de sens, démobilisation, visibilité incertaine sur l’avenir, perte de repères. Nous avons tou·te·s été touché·e·s par cette situation, mais c’était encore plus difficile pour les personnes en situation de vulnérabilité qui subissent de plus lourdes conséquences. Nous avons donc eu l’idée de lancer ce projet afin de nous rendre au contact des publics fragilisés.

Quelle a été la première expérience de poney itinérant ?
Dans le cadre d’un marché public avec le Conseil Départemental d’Eure-et-Loir et en partenariat avec le Centre Départemental de l’Enfance et de la Famille de Champhol, nous avons accompagné des enfants, des jeunes et des parents accompagnés par l’aide sociale à l’enfance.
Étant donné le contexte sanitaire et les confinements successifs, nous sommes intervenus toutes les semaines au sein de ce foyer pendant plus d’un an. Cette expérience a lancé l’idée des « poneys itinérants » et nous a permis de mettre en place une première expérimentation. Nous avons observé de nombreux bienfaits pour les participant·es qui étaient très heureux d’accueillir les poneys sur leur lieu de vie chaque semaine.
Les poneys peuvent-ils se déplacer partout ? Sur quels lieux allez-vous ?
Oui bien sûr ! Nous intervenons au sein de foyers, dans des quartiers prioritaires au pied des immeubles en partenariat avec ATD Quart Monde et le Contrat de ville, dans des EHPAD (Nogent-le-Rotrou, Bretoncelles, Senonches, La Loupe...). Les poneys des Écuries Saint Victor possèdent une grande capacité d’adaptation qui leur permet d’intervenir au sein de n’importe quel espace. Nous rentrons même dans les chambres des résident·e·s de certains EHPAD !

Quels sont les avantages de l’itinérance par rapport à des activités de médiation équine au sein des écuries ?
Ces séances sont complémentaires des activités réalisées sur le site de nos écuries partenaires, à Saint-Victor-de-Buthon. Lorsque nous accueillons des groupes aux écuries, nous disposons des infrastructures nécessaires pour faciliter les déplacements des personnes en difficulté motrice. Le fait de nous déplacer encourage l’accès à des activités qui sortent du quotidien pour des personnes qui n’en auraient pas la connaissance ou le goût. C’est une façon d’augmenter la découverte et l’adhésion à une nouvelle proposition et de limiter les freins à une activité apprenante et dynamique.
Cela permet aussi le partage au sein des familles : vivre l’activité dans son espace de vie favorise le développement de liens familiaux agréables. En effet, le cheval agit comme un médiateur en étant plongé dans le contexte de vie quotidienne des publics.
Cette approche apporte un réel souffle, une respiration bienvenue pour les personnes à mobilité réduite ou isolée qui rencontrent des difficultés à se déplacer en-dehors de leur espace de vie.

Quelles sont les activités proposées ? Est-ce que vous suivez régulièrement des groupes comme pour les séances de médiation aux écuries ou est-ce une activité ponctuelle ?
Nous proposons principalement des activités au sol à côté des chevaux autour de l’aspect sensoriel (caresser, brosser), relationnel (échanges, stimulation de souvenirs, lien avec l’animal), moteur (parcours à pied avec le cheval, se déplacer, réaliser des exercices ludiques) ainsi qu'éducatif avec les notions de savoir-être (développer la confiance en soi, améliorer la relation à l’autre, dépasser ses appréhensions, gérer son stress). Nous intervenons au sein des mêmes établissements régulièrement, dans des EHPAD et sur le quartier de Nogent-le-Rotrou, environ 1 ou 2 fois par trimestre.
Lors des séances avec les familles du quartier prioritaire de Nogent-le-Rotrou, nous proposons aussi des activités à cheval. Petits et grands ont ainsi accès à la même activité, et cela introduit une dimension de plaisir et de bien-être supplémentaire grâce à la sensation de portage sur le cheval. Que l'on se sent heureux et valorisé, sur son poney ou son cheval, au pied de son immeuble... !

Ce projet a besoin de vous !
Comment ce projet a pu voir le jour ?
Nous avons créé une campagne de financement participatif Efferve’sens grâce aux partenariats établis avec France Active et la Région Centre Val de Loire. Nous avons eu connaissance de cette campagne et avons candidaté pour nous permettre de lancer ce projet. Nous avons été très soutenus par l'équipe de France active et notamment Marie Coupey, ainsi que les 80 donateur·trices que nous remercions très chaleureusement.
Quels partenariats cherchez-vous à développer aujourd’hui ?
Nous souhaitons développer nos interventions au sein d’autres EHPAD en Eure-et-Loir, dans la Sarthe et dans l’Orne, ainsi que dans des hôpitaux et en milieu carcéral. Ce dernier projet est en préparation depuis quelques mois, nous aimerions pénétrer au cœur des établissements pénitentiaires avec nos chevaux. Nous souhaitons donner davantage de visibilité à ce projet afin de permettre à un plus grand nombre de personnes d’avoir accès aux bienfaits de la médiation équine.
Quels sont les points forts d’Équit’harmonie ?
Nous sommes une équipe pluridisciplinaire composée à la fois de professionnelles et de volontaires en service civique, ce qui permet une prise en charge globale et efficiente, en garantissant des suivis de qualité et des évaluations adaptées. Nous travaillons avec des chevaux à la fois doux et patients, chouchoutés par l'équipe des Écuries Saint Victor, qui sont pertinents pour accompagner les publics en situation isolée ou difficile.
Nous nous situons dans une démarche d'économie sociale et solidaire avec des valeurs telles que le respect du bien-être animal et humain, l’inclusion, la coopération et la bienveillance. Notre organisation interne fonctionne d'ailleurs avec une méthode innovante, la gouvernance partagée. Nous avons d’ailleurs obtenu en 2021 le prix régional de l’Économie Sociale et Solidaire, dans la catégorie « utilité sociale ».
Nous remercions chaleureusement les structures qui nous font confiance depuis des années, ainsi que nos partenaires financiers qui permettent le déroulement de ces activités dans des conditions optimales.
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